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Divorce et confinement : que peuvent faire ou non les époux ?

Le 28 avril 2020

Alors que certains médias ont pu s’amuser (parfois même avec démesure et sans retenue) de l’éventualité de la multiplication des divorces après le confinement, ils n’ont pas évoqué la situation de milliers de couples qui sont en train ou qui envisagent de divorcer.

Certains sont dans l’attente d’une ordonnance de non-conciliation fixant les mesures provisoires, d’un jugement au fond prononçant le divorce et statuant sur ses conséquences ou d’un arrêt de Cour d’appel.

D’autres ont entamé une procédure de divorce, ou envisagent de le faire.

Dans toutes ces hypothèses, les époux se pensent peut-être bloqués par la situation de confinement.

Ce n’est pourtant pas le cas. Même si nos juridictions sont à l’arrêt pour toutes les audiences non urgentes, les auxiliaires de justice comme les avocats n’ont pas suspendu leur devoir de conseil et d’assistance. Le temps du confinement doit être un temps profitable de réflexion pour avancer, réfléchir, voire concrétiser des mesures.

1/ Séparés, divorcés, en attente d’un jugement ou d’un arrêt de Cour d’appel en confinement, comment gérer la situation ?

Si les époux sont dans l’attente d’une ordonnance de non-conciliation statuant sur les mesures provisoires, ils doivent continuer d’appliquer toutes les obligations légales du mariage. Ils sont notamment tenus de vivre ensemble même si la bonne application du devoir de cohabitation reste « théorique », les parties étant passées devant le Juge qui a pu constater leur séparation par exemple. Si le couple a des enfants mineurs, comme aucune mesure n’est encore venue fixer les modalités de droit de visite et d’hébergement des enfants, le mieux est que les parents s’accordent entre eux, le temps du confinement.

Si les époux ont déjà obtenu une ordonnance de non-conciliation et sont dans l’attente d’un jugement au fond statuant sur les conséquences du divorce et le fondement juridique, ils doivent continuer d’appliquer les mesures provisoires de l’ordonnance de non-conciliation, notamment en ce qui concerne les modalités de droit de visite et d’hébergement des enfants mineurs.

Si les époux sont dans l’attente d’un arrêt de la Cour d’appel, le jugement du Juge aux affaires familiales prévaut en ce qui concerne les mesures rendues avec exécution provisoire. Le reste étant suspendu dans l’attente de l’arrêt à venir.

Quelques questions peuvent par exemple se poser :

  • L’époux qui est débiteur d’une pension alimentaire doit-il payer le devoir de secours à l’autre s’il se maintient à domicile ?
    En principe oui, il s’agit d’une obligation alimentaire, une entraide qui doit être appliquée. Le bon sens amènerait néanmoins l’époux débiteur à bien respecter cette obligation par le versement de la somme d’argent prononcée par le Juge ou bien à compenser autrement (par exemple : hébergement gratuit, nourriture).
  • L’époux qui se maintient au domicile conjugal alors qu’il lui a été ordonné un délai pour quitter les lieux qui a expiré doit-il partir ?
    En principe oui même si cela a des difficultés pratiques au vu du confinement et ce pour éviter tout conflit. Alors il faudrait qu’il puisse trouver un logement, même temporaire dans sa famille par exemple.

 

2/ Et pour ceux qui souhaitent divorcer ?

Certes, les Tribunaux ont suspendu leurs audiences non urgentes et les conventions de divorce par consentement mutuel ne peuvent pas être signées pendant le confinement, mais l’intention de séparation et les modalités permettant d’aboutir à un accord peuvent être réfléchies et envisagées d’ores et déjà.

Rappelons qu’en France, un divorce peut être prononcé dans quatre cas différents. En effet, l’article 229 du Code civil dispose que :

« Le divorce peut être prononcé en cas :

de consentement mutuel ;
d’acceptation du principe de la rupture du mariage ;
d’altération définitive du lien conjugal ;
de faute. »

Concrètement, comment faire pour divorcer par consentement mutuel en étant confiné ?

  • L’époux qui souhaite divorcer doit tout d’abord prendre attache avec un avocat pour qu’il vous explique le processus de ce divorce (chaque époux doit avoir son avocat, les parties se mettent d’accord pour signer une convention « sorte de contrat » prévoyant des accords et concessions réciproques sur les modalités relatives aux époux (impliquant la liquidation du régime matrimonial et un partage) et aux enfants (organisation de l’exercice de l’autorité parentale : résidence de l’enfant, droit de visite et d’hébergement, garde alternée, contribution à l’entretien et à l’éducation).
  • L’avocat pourra alors adresser une lettre d’usage à l’autre époux (via les services postaux par internet cela est bien entendu possible) ou bien répondre à un Confrère déjà désigné par l’autre conjoint ;
  • L’avocat, en coordination avec son client, pourra faire des propositions confidentielles sur les éléments qui composeront la convention de divorce par consentement mutuel, organiser des négociations avec l’autre avocat, éventuellement via des vidéoconférences en présence ou non des clients, etc ;
  • Un projet de convention de divorce par consentement mutuel pourra être élaboré. Il servira de base de réflexion et pourra même être finalisé (à condition que les époux justifient et disposent réellement d’un hébergement séparé pour l’avenir) pour qu’il soit signé par les parties et leurs avocats après le confinement et un délai de réflexion de 15 jours.

Si les époux disposent d’une communauté, biens communs et souhaitent divorcer par consentement mutuel ?

La prise de contact avec un avocat reste de la même teneur.

Ce qui change est toutefois que l’avocat rentrera en contact avec son notaire habituel (ou le notaire habituel du client ou du Confrère) pour que soit organisé un état liquidatif du régime matrimonial qui pourra être rédigé également parallèlement. Les notaires ont également, comme les avocats, organisé leur quotidien pour suivre leur dossier et travailler.

 

Comment divorcer de manière « contentieuse » en confinement ?

  • Si vous souhaitez divorcer, il vous faudra au préalable, prendre attache avec un avocat pour qu’il vous explique la procédure de divorce et les différents cas de divorce : 
  • Il pourra alors vous indiquer s’il ne vaut mieux pas privilégier un divorce par consentement mutuel alors même que vous envisagiez une voie contentieuse.
  • L’avocat pourra surtout vous préciser la durée d’une procédure de divorce contentieuse.
  • Il vous expliquera que les différents cas de divorces contentieux sont soumis à une procédure préalable commune (actuellement et en principe jusqu’au 1er septembre 2020 mais rien n’est moins sûr puisque la Ministre de la Justice a annoncé que la réforme du divorce serait de nouveau probablement reportée APRÈS le 1er septembre 2020 (1).) dont les étapes sont les suivantes :
  • 1/ L’avocat de l’époux qui souhaite divorcer dépose une requête au Juge des Affaires Familiales contenant des mesures provisoires (art. 1106 du Code de procédure civile et 255 du Code civil) comme attribuer le logement de manière gratuite ou non (avec indemnité d’occupation ou non), fixer une pension alimentaire et une provision pour les frais d’instance, désigné un notaire, etc.), fixer les mesures provisoires relatives aux enfants
  • 2/ Après réception de la requête initiale, le Juge organise obligatoirement une audience de tentative de conciliation en présence des époux obligatoirement et de leurs avocats.
  • 3/ Dans les trois mois à compter de l’ordonnance de non-conciliation, l’époux à l’origine de la requête initiale, peut assigner son conjoint devant le Tribunal Judiciaire. L’époux défendeur a également la possibilité d’établir une assignation dans un délai de trois mois et il sera choisi le « fondement » du divorce : l’acceptation du principe de divorce, l’altération du lien conjugal (cessation de la communauté de vie depuis 2 ans), ou encore la faute (violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage qui rendent intolérable le maintien de la vie commune).
  • Ainsi, vous pourrez alors commencer à examiner avec votre avocat ce que vous souhaitez inclure dans la requête et à collecter les documents à verser aux débats (commande des actes d’état civil, etc.).
  • L’avocat pourra aussi adresser une lettre d’usage à l’autre époux (via les services postaux par internet cela est bien entendu possible) ou bien répondre à un Confrère déjà désigné par l’autre conjoint.
  • Il pourra aussi entamer un dialogue confidentiel pour organiser au mieux la séparation du couple et les modalités relatives aux enfants.

 

(1) Voir en effet la vidéo "Impact, gestion et conséquences de l’épidémie de Coronavirus-Covid 19 : Mme Nicole Belloubet, garde des Sceaux, ministre de la Justice" sur le site de l’Assemblée Nationale, à la 42 min et 20’ environ, celle-ci indiquant que soit reportée la réforme du divorce dont le vote sera remis au Parlement.

Elle estime que l’application de cette réforme au 1er septembre 2020 fera une "charge trop lourde pour les avocats et pour les personnels de justice"

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